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Afrique: l’extrême pauvreté s’accroît

Le 26e rapport sur le Pool de l’Afrique, rédigé par la Banque mondiale, est paru début octobre 2022. Le document informe que la croissance économique de l’Afrique devrait décélerer passant de 4,1% en 2021, à 3,3% en 2022. Et les nouvelles ne sont pas très réjouissantes pour le continent.  Conjoncture mondiale, inflation croissante, risque de stagflation, haut niveau des taux d’intérêt et de la dette…. Retour sur les messages clés contenus dans le document.

Plus d’une personne sur cinq confrontées à la faim

Compte tenu de leurs schémas de consommation et de production actuels, de nombreux pays de la région dépendent des importations alimentaires. En raison de la divergence croissante entre l’offre et la demande, la facture des importations alimentaires de l’Afrique a augmenté d’environ 35,7 milliards USD au cours du dernier quart de siècle, passant de 7,9 milliards USD en 1993-1995 à 43,6 milliards USD en 2018-20.

La guerre en Ukraine a accéléré une inflation déjà orientée à la hausse dans la région, affirme le document. La hausse de l’inflation pèse sur l’activité économique en Afrique subsaharienne (ASS), en déprimant à la fois les investissements des entreprises et la consommation des ménages. En juillet 2022, 29 des 33 pays d’Afrique subsaharienne pour lesquels des informations sont disponibles présentaient des taux d’inflation supérieurs à 5%, tandis que 17 pays affichaient une inflation à deux chiffres.

Cette inflation fonctionne comme une taxe régressive, touchant de manière disproportionnée les pauvres. Dans la région Afrique subsaharienne, la forte répercussion des prix des denrées alimentaires et des carburants sur les prix à la consommation a fait grimper l’inflation à des niveaux record dans de nombreux pays, dépassant le plafond des objectifs des Banques centrales dans la plupart des pays qui en ont un. La grande majorité de la population d’Afrique subsaharienne est touchée par les prix élevés des denrées alimentaires, car elle consacre en moyenne plus de 40 % de ses dépenses totales à l’alimentation. La hausse des prix des denrées alimentaires entraîne des difficultés aux conséquences graves dans l’une des régions du monde où l’insécurité alimentaire est la plus forte. La faim a fortement augmenté en Afrique subsaharienne ces dernières années, en raison des pertes de revenus et des perturbations de la chaîne d’approvisionnement causées par la pandémie, des conflits régionaux et mondiaux, des conditions climatiques extrêmes et de l’invasion de criquets. Plus d’une personne sur cinq en Afrique est confrontée à la faim – une proportion bien plus grande que dans les autres régions du monde-.

140 millions de personnes en insécurité alimentaire aiguë

D’ici 2030, on comptera près d’un demi-milliard de personnes supplémentaires à nourrir, soit une augmentation de 45 % par rapport à aujourd’hui.

« L’insécurité alimentaire aiguë (phase 3 de la CIP ou plus) est également en hausse : on comptait 140 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire aiguë en 2022, contre 120 millions en 2021 », affirme le rapport 2022 de Africa’s Pulse. Au moins 55 millions de personnes dans la Corne de l’Afrique sont en situation d’insécurité alimentaire grave, l’Éthiopie, le Kenya et la Somalie connaissant la pire sécheresse depuis 40 ans.  En guise de recommandation, la Banque mondiale alerte : « si les décideurs africains ne prennent pas de mesures urgentes, la sécurité alimentaire continuera de se dégrader, avec des conséquences dévastatrices pour les populations les plus pauvres et les plus vulnérables d’Afrique. En période de crise et de ressources limitées, il est impératif que les gouvernements trouvent des moyens de soutenir les ménages les plus pauvres tout en réorientant leurs dépenses agricoles et alimentaires vers les biens publics qui produisent les meilleurs résultats en matière de développement ».

Une croissance au ralenti

L’aggravation de l’insécurité alimentaire parmi les ménages de certains pays de la région (Ouganda, Nigeria, Malawi, Éthiopie et Burkina Faso) est confirmée par des données récentes issues d’enquêtes téléphoniques à haute fréquence, après le début de la pandémie de COVID-19

Après ces constats, les experts de la Banque mondiale tablent sur une croissance économique en Afrique subsaharienne (ASS) qui devrait décélérer, passant de 4,1 % en 2021 à 3,3 % en 2022, en raison du ralentissement de la croissance mondiale, de la hausse de l’inflation exacerbée par la guerre en Ukraine, de conditions météorologiques défavorables, du resserrement des conditions financières mondiales et du risque croissant de surendettement. Ces tendances compromettent la réduction de la pauvreté, déjà mise à mal par l’impact de la pandémie de COVID-19.

Pire, ces défis économiques surviennent à un moment où la capacité des pays à soutenir la croissance et à protéger les ménages pauvres est fortement limitée. La marge de manœuvre budgétaire est presqu’épuisée dans certains pays d›Afrique subsaharienne, principalement en raison du niveau élevé de la dette, de la hausse des coûts d›emprunt et de l›épuisement de l›épargne publique. Le déficit budgétaire de la région s›est creusé pendant la pandémie pour atteindre 5,6 % du PIB en 2020 (contre 3 % du PIB en 2019). En 2022, le déficit s›élève à 4,8 % du PIB, en raison des efforts de consolidation. La dette devrait rester élevée à 59,5 % du PIB en 2022, en Afrique subsaharienne. Huit des 38 pays éligibles à l’IDA dans la région sont en situation de surendettement, et 14 risquent fortement de les rejoindre. Les gouvernements africains ont consacré 16,5 % de leurs recettes au service de la dette extérieure en 2021, contre moins de 5 % en 2010.

NK

 

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Projections de croissance pour les principales économies d’Afrique

En Afrique du Sud, l’économie a ralenti à 0,2 % en glissement annuel au second trimestre 2022, contre 2,7 % au trimestre précédent. L’économie devrait croître de 1,9 % cette année.

L’économie angolaise est l’une des principales bénéficiaires de termes d›échange favorables qui se traduisent par une croissance réelle de 3,1 % en 2022.

Le Kenya devrait connaître une croissance de 5,0 % en 2023 (contre 5,5 % auparavant) et remonter à 5,3 % en 2024.

L’Éthiopie aura du mal à retrouver ses performances d’avant la pandémie, en raison du conflit prolongé dans la région du Nord, qui fait fuir les investissements. Le PIB réel devrait croître régulièrement de 5,3 % en 2023 (contre 3,5 % auparavant) à 6,1 % en 2024.

Le Botswana et la Zambie connaîtront une croissance de 4,0 % en 2023 (contre 3,2 et 3,3 % respectivement). Alors que la croissance devrait se ralentir au Botswana (3,7 %) en 2024, elle devrait s’accélérer pour atteindre 4,2 % en Zambie.

La croissance du PIB réel au Nigeria devrait ralentir, passant de 3,6 % en 2021 à 3,3 % en 2022, la croissance économique du pays continuant de pâtir de la contreperformance du secteur pétrolier.

Le Tchad et la République du Congo devraient sortir de récessions de deux et sept ans en 2022 et devraient connaître une croissance de 3,1 et 1,9 %, respectivement, grâce à la combinaison de la flambée des prix du pétrole, de la stabilité de la production pétrolière et des bonnes performances du secteur non pétrolier.

Au Niger, la croissance devrait bondir de 3,6 points de pourcentage pour atteindre 5,0 %, grâce à l’expansion du secteur agricole, après une grave sécheresse en 2021.

Au Ghana, la croissance devrait ralentir en 2022 pour atteindre 3,5 %, ce qui est bien inférieur à la performance moyenne du pays avant la pandémie (7 %), en raison de la hausse de la dette publique, de l’inflation élevée et de la dépréciation de la monnaie.

La croissance en Côte d’Ivoire devrait rebondir de 5,7 % en 2022 à 6,8 %, avant de retomber à 6,6 %.

Après avoir ralenti à 4,8 % en 2022, la croissance au Sénégal devrait bondir à 8,0 % en 2023 et se raffermir à 10,5 % en 2024.

Le Gabon devrait poursuivre sa tendance à la hausse, mais à un rythme lent. La croissance devrait atteindre 3,0 % en 2023 (contre 2,7 % auparavant).

Au Cameroun, l’économie maintiendra sa croissance régulière en 2023 (4,3 %) et 2024 (4,6 %), soutenue par l’investissement et la consommation privée.o

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