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Hydrocarbures: les défis de la Sonabhy

En attendant les dépôts régionaux, la Direction générale renforce la capacité de Bingo et de Péni.
Les nouveaux postes de depotage. L’ancien site sera transformé pour servir aux chargements des distributeurs.

7 ans après la célébration du 30e anniversaire de la Sonabhy, le contexte a changé, les besoins aussi, mais les équations de la Sonabhy restent entières : retard de paiement de la subvention de l’Etat, tension de trésorerie, frais financiers élevés, dette Sonabel , adaptation permanente des capacités de stockage et de chargement des camions et bouteilles de gaz.
Nommé le 27 avril 2022, en pleine tourmente sur le marché international du pétrole, le nouveau Directeur général, le Commandant ingénieur en énergie, Wend Kouni Joanny Compaoré, et son équipe devront faire face à une situation exceptionnelle. Le défi : garantir la disponibilité du carburant au Faso à des coûts raisonnables. Elle n’a pas encore failli à cette mission, mais cette fois, le challenge est plus grand, vu le contexte.
La situation du marché des hydrocarbures est marquée ces 5 derniers mois par une hausse des cours des produits pétroliers tirée dans un premier temps, par la relance post Covid-19 avec de grands besoins en Chine, toute chose qui s’est aggravée avec le déclenchement de la guerre en Ukraine et l’embargo sur la Russie. On assiste donc à une demande plus forte combinée à la non-disponibilité de la ressource du fait des perturbations liées à l’embargo. La Russie compte pour 30% dans l’approvisionnement de la zone Afrique de l’Ouest. On comprend dès lors les tensions au niveau de l’approvisionnement en Afrique de l’Ouest et au Burkina Faso. Le marché burkinabè subit donc les secousses de ce qui se passe sur le marché mondial. Car sa consommation explose ainsi. Rien que pour le super, la consommation a augmenté de 72% entre le premier semestre 2021 et 2022.

Nouveaux bacs de stockage de 30.000 m3 chacun pour le super et le gasoil. (DR)

Le cours du baril s’établit ces derniers temps au-delà de 100 dollars. Avec une pointe autour de 137 dollars à la date du 8 mars 2022. C’est un fait exceptionnel. Cette hausse des cours du baril est aggravée par la hausse du cours du dollar autour de 600 dollars, voire plus, fait remarquer le responsable des approvisionnements de la Sonabhy, Raoul Koudougou. Cette double tendance haussière du prix du baril et du dollar ajoutée à la baisse de la ressource sur le marché international impacte les prix à la pompe. Ce qui explique la dernière augmentation des prix, notamment, de 100 francs sur le litre du super. Un réajustement qui vise à permettre à la Sonabhy de souffler au niveau de sa trésorerie. Dans les faits, le prix réel du super tournerait entre 1.000 et 1.200 francs, avec une subvention autour de 400 francs. Cette hausse permet à l’Etat de supporter 300 francs à reverser à la Sonabhy comme subvention qui, malheureusement, n’est pas souvent reversée à bonne date. Ces retards impactent la trésorerie de la société et l’obligent à négocier des lignes de crédits avec des frais financiers coûteux avec les banques de la place et avec IFTC, une filiale de la banque islamique.
Risque de défaillance. Si les tensions de trésorerie persistent et le niveau des cours se maintiennent, on court, à terme, vers des gros risques. L’écart entre le prix réel d’achat et la vente deviendra intenable. Ces deux dernières années, l’Etat rembourse la subvention avec des titres cessibles que la Sonabhy vend auprès des banques pour avoir de la liquidité pour se financer et l’Etat rembourse les détenteurs. Nous avons eu des protocoles dans ce sens en 2021 avec l’Etat sur les manques à gagner (moins-values), précise le responsable financier, Siméon Sidibé. Le dialogue entre la société et le gouvernement est donc permanent pour trouver des solutions aux préoccupations de la société.

Flux tendu
Depuis le mois de septembre 2021, les actions menées conjointement par l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la fraude et les Forces de défense et de sécurité ont entrainé une forte augmentation de la demande, en particulier, celle du super qui a enregistré un taux d’accroissement de 60%. Cette situation a entrainé une détérioration de notre stock de fonctionnement en interne, nous obligeant à fonctionner à flux tendu ; c’est-à-dire, les chargements des camions citernes au niveau de deux dépôts intérieurs se font principalement à partir des arrivées des CC de la semaine pour satisfaire la demande. La perturbation du marché pétrolier consécutive à la crise en Ukraine à partir du mois de mars 2022 a dégradé la situation de nos stocks extérieurs à cause de l’indisponibilité du produit sur le marché et des retards de livraison des produits par certains fournisseurs au niveau de nos dépôts extérieurs. Malgré ce contexte extrêmement difficile (coûts d’acquisition du produit très élevés, indisponibilité de produit,…), la Sonabhy se doit de trouver les voies et moyens pour assurer sa mission principale d’approvisionnement du pays en produits pétroliers en toute sécurité et sans rupture, sans occulter un probable risque de rupture, au regard du contexte actuel. Les primes d’acquisition des produits actuellement varient entre 100 et 185 USD/TM, contre une prime structure de prix concédée par l’Etat à 40 USD/TM.

Cas de la prime

Nouvelle sphère de stockage de 4000 tonnes en finition. (DR)

Prix CAF du mois M : prix calculé sur la base de la moyenne des cours des produits publiés par le Journal PLATT’S des 25 premiers jours du mois précédent (M-1) + la prime. La prime représente les frais de transfert du produit depuis le port de chargement au port de déchargement plus la marge du fournisseur. La prime actuelle sur le marché est largement au-dessus de celle fixée par l’état qui est de 40 USD/TM. La Sonabhy est obligée de débourser un surplus d’argent pour acquérir le produit avec des coûts d’acquisition du double ou triple qui malheureusement, reflètent la réalité du marché. Ce financement des achats des produits se fait à travers des lignes de découverts auprès des banques et certaines institutions financières (banques, ITFC,…).
FW

 

Encadré 1

Le manque à gagner

La dernière augmentation des prix du carburant n’est pas proportionnelle à la hausse des cours, elle attenue la tension de trésorerie.
Prix réel sans la subvention : super entre 1.000 et 1.200 F/l. L’augmentation ne couvre qu’une partie des 100 FCFA sur les 400 FCFA, donc un gap de 300 FCFA. C’est le remboursement de ce montant au litre qui constitue le manque à gagner qui est souvent payé en retard. Cette situation n’arrange pas la société. La vérité des prix sauverait la Sonabhy  des tensions de trésorerie et lui éviterait les crédits. Et comme l’Etat ne rembourse pas toujours à bonne date, il y a lieu de craindre à un blocage un jour, si les écarts deviennent très élevés.

Encadré 2

Stratégies d’approvisionnement

On se pose souvent la question pourquoi acheter si loin alors que des pays voisins disposent de produit. Le Niger a été sollicité entretemps. Mais ce pays a des difficultés actuellement pour satisfaire sa demande intérieure. Au regard du contexte, il a déclaré ne pas pouvoir honorer les demandes du Burkina Faso, a tenu à préciser mdiii. Le corridor ghanéen est réactivé. On apprend que dans le dernier appel d’offres, 30 à 40% viendra du Ghana, au vu de sa grande capacité de stockage et de chargement. Le partenariat avec la société ivoirienne de raffinage pour ravitailler l’ouest du pays par voie ferroviaire est maintenu et pourrait se renforcer.
Au titre du renforcement de ses capacités de stockage interne d’ici la fin de l’année, elles seront multipliées par 3 sur la base des projets en cours à Bingo et à Péni. A Bingo, les travaux d’extension vont faire passer les capacités de 45.000 m3 à 105.000 m3 les hydrocarbures liquides et pour le gaz ; 4.000 tonnes supplémentaires de capacités. Pour le dépôt de Péni, les capacités sont en train d’être portées à 104.000 m3, dont 60.000 m3 pour le super et 40.000 m3 pour le gasoil.
Les projets de dépôts régionaux sont en standby à l’Est, au Centre-Nord et au Nord. A l’Est, celui de Fada est le plus avancé. Le site a été acquis et les travaux de bornage ont commencé. Pour des raisons d’insécurité à l’Est, les activités sont suspendues. Dans les autres régions, des sites sont acquis, à Kaya au Centre-Nord avec 60 hectares et il reste à acquérir dans le Nord du pays un terrain de 50ha. L’objectif était d’installer des centres emplisseurs dans chacune des 8 régions retenues.

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RAF
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