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Finance islamique: des défis à relever pour l’UEMOA

A ce jour, la zone UEMOA est la zone économique la plus prolifique d’Afrique avec six émissions de Sukuk et un montant cumulé de 850 milliards FCFA. Ces statistiques de l’UEMOA montrent que la finance islamique est dynamique dans la zone. Cependant, des défis sont à relever pour permettre à la région de pleinement exploiter son potentiel dans ce domaine. Les challenges que doit relever l’Union sont au niveau des ressources humaines, de la fiscalité, de l’optimisation du cadre règlementaire et du marché interbancaire islamique, selon l’état des lieux de l’industrie de la finance islamique, édition 2020, produit par l’UEMOA.

Formés des professionnels de la finance islamique

L’un des premiers défis de la région est le besoin de spécialisation. « Il est important d’insister sur la nécessité de structurer des spécialisations en finance islamique », déclare le document. Une spécialisation qui devrait être axée sur la comptabilité, le marketing, la gouvernance, le droit islamique, la gestion de trésorerie et l’éthique. Car ces métiers de la banque islamique demandent des professionnels de la finance islamique. « Un idéal leibnizien aurait voulu que tout jeune étudiant sorti d’un collège au sein de l’UEMOA puisse y demeurer et suivre son cursus jusqu’au Doctorat en Finance islamique », proposent les rédacteurs du document. Mais le constat est tout autre.

L’absence d’une véritable école doctorale dans la zone oblige toute personne ayant l’ambition de faire une thèse en Finance islamique, soit de s’expatrier pour intégrer une université spécialisée dans le Golfe, au Maghreb, au Soudan ou encore en Malaisie afin de pouvoir le faire, soit  d’opter pour une thèse « sur la Finance islamique », avec un thème en rapport avec la finance islamique ou son développement dans une université du système conventionnel. Dans les deux cas, cela ne pourrait remplacer l’avantage d’avoir une telle entité dans la région pour former des professionnels et chercheurs de haut niveau et en adéquation avec les besoins du marché ainsi qu’avec toutes les réalités socioéconomiques. Cela constituerait un gage du développement de l’industrie sur le long terme.

La capacité d’absorption face à la faible pénétration

C’est le second défi que l’on doit relever. Pour les experts de l’Union, passée la période des présentations, il est important de porter un regard critique sur cette industrie ainsi que sur ses insuffisances dans la zone. « Surtout que l’optimisme suscité dans ses débuts ne durera pas éternellement », préviennent-ils.

Selon les chiffres officiels, l’UEMOA a une population estimée à 106 millions d’habitants, majoritairement musulmane. La première particularité de cette population musulmane est qu’elle a une obligation religieuse de privilégier les produits financiers islamiques du moment où ceux-ci sont disponibles. La seconde particularité de cette population est sa participation très impressionnante dans le secteur du commerce dans tous les Etats de l’Union. Des riches commerçants musulmans et réputés, on en retrouve un peu partout et parfois même contrôlant des pans entiers de l’économie. Cela, bien entendu, constitue une opportunité pour la finance islamique qui se porterait nettement mieux si elle réussissait à capter ces capitaux qui très souvent, sont exclus du système financier classique.

L’agriculture est dominée dans la zone par des méthodes traditionnelles de culture qui ne permettent pas d’optimiser l’activité en termes de revenus et de capacité de production. La mécanisation de cette agriculture couplée au recours à des techniques innovantes de production sont des axes encore inexplorés à ce jour par le système financier classique. Pourtant, des produits de finance islamique (notamment, le Musacat, la Salam, la Ijara, la Mourabaha…) pourraient aisément permettre à ces exploitants agricoles, peu importe leur taille, de franchir un cap dans leur activité et sortir de la pauvreté. D’autres secteurs peuvent également être énumérés en fonction de leur besoin en adéquation avec les produits financiers islamiques. Ce sont, notamment, l’immobilier, le commerce intra régional, les nouvelles technologies et bien d’autres.

Le faible taux de pénétration de la finance islamique

Depuis 2012, plusieurs types d’actions ont étés menées dans le cadre de la promotion de la finance islamique, notamment, des séminaires, des forums, des campagnes promotionnelles, des actions au plan règlementaire, etc.

« Hélas, force est de constater que la finance islamique, malgré tous ses avantages et son potentiel, n’arrive toujours pas à connaitre le grand décollage espéré », affirme le rapport. Les raisons ? Il y a d’abord, le mauvais positionnement. Les banques islamiques dans l’UEMOA font généralement l’erreur de se positionner sur le même segment que leurs consœurs de la conventionnelle qui, elles, ont plusieurs décennies d’expérience.

De plus, la politique fiscale est désavantageuse à la finance islamique. En dehors du Sénégal et du Niger qui ont revu leur cadre fiscal afin de prendre en compte les spécificités de la finance islamique, les autres Etats sont à la traîne. Ce qui constitue un handicap probant pour les banques islamiques en termes de compétitivité, vu que leurs produits ont un coût plus élevé repoussant ainsi les populations à revenu faible.

NK

Encadré

Banques et fenêtres islamiques: l’exemple de Coris Bank International

Le rapport de l’Union sur la finance islamique a dressé l’état des lieux des institutions présentes dans l’espace UEMOA, au niveau des banques, de la microfinance et de l’assurance islamique. Au niveau des banques et fenêtres islamiques, le secteur bancaire islamique de la zone UEMOA est dominé par deux Holdings qui ont chacune bénéficié de l’appui du Groupe de la BID. Tamweel Africa Holding, qui bénéficie de la participation au capital de la BID et de la SID, détient à ce jour trois succursales dans la zone CEDEAO, dont deux dans la zone UEMOA. Le Groupe Coris Bank International (CBI) a bénéficié de l’octroi d’une ligne de financement de la SID en 2012 pour la mise en place d’une fenêtre islamique appelée Baraka. CBI Baraka, à ce jour, a cinq filiales dans l’UEMOA.

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