Chronique

Propriété industrielle: Les signes distinctifs de l’entreprise (1)

D’année en année, nous assistons à une augmentation croissante du nombre d’entreprises au sein des pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Au Burkina Faso, par exemple, l’on dénombrait 7.564 entreprises créées et immatriculées en 2015, 11661 en 2016, 12.619 en 2017 et 12.300 en 2018. Avec au moins autant d’entreprises dans chaque Etat membre, l’espace UEMOA pourrait compter aujourd’hui plus de 100.000 entreprises en activités. Autant de dénominations d’entreprises, autant de noms commerciaux auxquels l’on ajoute tout au moins autant de marques de produits ou de services. Sans oublier les marques et autres signes distinctifs des entreprises étrangères exerçant leurs activités dans l’espace UEMOA… C’est donc logique si nous constatons depuis quelques années, une multiplication des conflits et différends sur les signes distinctifs utilisés par les entreprises évoluant dans l’espace UEMOA. Conscients des enjeux, les pouvoirs publics, les institutions et autres structures d’encadrement du secteur privé s’efforcent de rendre la situation moins confuse et plus saine, en mettant l’accent sur le choix et la protection des signes distinctifs des entreprises. L’on distingue deux catégories de signes distinctifs d’entreprise : les signes distinctifs à la création de l’entreprise et ceux de l’entreprise en activité.

Les signes distinctifs à la création de l’entreprise
Ce sont : la dénomination sociale, le nom commercial, l’enseigne et le sigle.
La dénomination sociale est l’appellation sous laquelle est connue et exploitée une société (commerciale ou civile). Ex : SOCIETE NOUVELLE – SOCIETE SUCRIERE DE LA COMOE (SN – SOSUCO).  Le nom commercial est l’appellation sous laquelle est connue une personne (physique) qui exerce son commerce. Conformément à l’article 136 de l’Acte uniforme portant sur le Droit commercial général (AUDCG), le nom commercial fait partie du fonds de commerce. Exemple : ETABLISSEMENTS SEGDA ET FRERES
L’enseigne : c’est elle qui sert à identifier et localiser géographiquement un établissement commercial (exploité soit par un commerçant personne physique ou personne morale) et qui permet de le distinguer des autres établissements commerciaux. Elle fait partie du fonds de commerce (Art. 136 AUDGC).
Le sigle est la suite de lettres initiales des termes de la dénomination sociale. La prononciation peut-être syllabique, alphabétique ou les deux. Exemple : EBOMAF ; CNSS®, LONAB®…
La dénomination sociale et le sigle (le cas échéant) font partie des mentions obligatoires des statuts des sociétés quelle que soit leur forme juridique (articles 13 et 14 de l’Acte uniforme sur le Droit des sociétés commerciales et du Groupement d’intérêt économique (AUSCGIE) de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du Droit des affaires (OHADA). Ainsi, toute société commerciale, lors de sa création, doit avoir obligatoirement une dénomination sociale.
En ce qui concerne les personnes physiques, elles n’ont pas l’obligation d’avoir un nom commercial. Cependant, dès lors qu’elles utilisent un nom commercial ou une enseigne pour mener leurs activités, l’article 44 de l’Acte uniforme sur le Droit commercial général (AUDCG) les oblige à en faire mention dans leur demande d’immatriculation. Nous le savons tous, le Registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM) a pour mission générale la collecte, la conservation et la diffusion de l’information économique en vue d’assurer la transparence et la loyauté nécessaires au développement des activités économiques. C’est une démarche préalable obligatoire à l’exercice d’une activité commerciale. L’attribution d’un nom commercial, d’une dénomination sociale et d’un sigle à une entreprise est faite par les pouvoirs publics, au moment de l’immatriculation de l’entreprise au RCCM ; cette attribution a pour conséquences juridiques de créer des droits exclusifs d’utilisation dudit signe à cette entreprise ; aucune autre entreprise ne devrait pouvoir utiliser ledit signe dans des activités commerciales identiques ou similaires. L’AUSCGIE prévoit en son article 16 qu’une société en cours de création ne peut prendre la dénomination d’une société déjà immatriculée au Registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM). Une fois que l’attribution du nom commercial ou de la dénomination sociale est effective au niveau du RCCM, toute personne est autorisée à en assurer l’enregistrement au niveau de l’OAPI selon les règles édictées par cette organisation.

Les signes distinctifs de l’entreprise en activité
Sont des signes distinctifs de l’entreprise en activité, les signes suivants :
La marque de produit : il s’agit de tout signe servant à identifier les produits d’une entreprise de ceux de ses concurrents. Exemple : BURKINDI® (vêtements) ; YELBA® (eau minérale) ; DAFANI® (jus de fruits) ; SAP Olympic® (pneumatiques)
La marque de commerce : elle est celle apposée par un commerçant sur un produit qu’il vend sans être lui-même le fabricant. Exemple : YAMAHA (marque de motocyclettes) ;
La marque de services : elle sert à distinguer les services offerts par les entreprises de prestations de services. Exemple : CORIS BANK INTERNATIONAL® (banques) ; UNIVERSITE AUBE NOUVELLE® (Education).
La marque collective : c’est une marque dont l’usage est réservé à une collectivité organisée dans une aire géographique, sous réserve du respect du cahier des charges par chacun des membres de cette collectivité. Exemple : la marque (le grenier) du Réseau des caisses populaires du Burkina Faso.
La marque de certification. C’est un signe attestant que le produit sur lequel elle est apposée remplit les garanties de qualité exigées par les textes organisant la certification. Elle est toujours accompagnée d’un label pour garantir la qualité du produit et le distinguer des produits identiques ou similaires non certifiés. Différence entre marque collective et marque de certification : la première est utilisée uniquement par la collectivité ou l’association qui l’a générée et protégée, alors que la deuxième permet à toute personne de l’apposer sur ses produits pourvu que lesdits produits ou services remplissent les normes de qualité exigées par l’organisme de certification. Exemple : le label WOOLMARK (Suisse) pour les produits en pure laine. La certification est l’œuvre d’un organisme habilité à cet effet. Fréquemment utilisées par les économies occidentales, les marques de certification sont actuellement peu utilisées par les pays africains. Marque de certification et marque individuelle peuvent être utilisées en même temps par un producteur sur ses produits. Ce faisant, la protection du produit s’en trouve renforcée. Le label apposé sur le produit certifié servira de preuve visuelle que les produits de l’entreprise répondent aux normes précises exigées par l’organisme de certification.
L’indication géographique : elle sert à identifier un produit comme étant originaire du territoire, d’une région ou localité de ce territoire, dans le cas où une qualité, réputation ou autres caractéristiques déterminées du produit peuvent être attribuées essentiellement à cette origine géographique. Exemple : LE MIEL DU GOURMA ; LE CHAPEAU DE SAPONE ; LE BOUBOU DAGARA.
Mathieu Hien, Conseil en propriété industrielle, Mandataire agréé auprès de l’OAPI Directeur du Cabinet AFRIC-PROPI-CONSEILS, Etudes, Assistance et Conseils en propriété intellectuelle
01 BP 5959 Ouagadougou 01/ Burkina Faso. Tél. : +226 25 43 66 21 / 70 244 248
Email : [email protected] ; site web : www.africpropiconseils.com

Mathieu Hien, Conseil en propriété industrielle, Mandataire agréé auprès de l’OAPI Directeur du Cabinet AFRIC-PROPI-CONSEILS, Etudes, Assistance et Conseils en propriété intellectuelle.
Encadré:
L’Accord de Bangui sur la protection des marques
de produits ou de services

La protection des marques de produits ou de services, des marques collectives et des indications géographiques est encadrée par l’Accord de Bangui (1999) instituant l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle. Ce sont donc les règles de cet Accord qui organisent leur appropriation au profit de toute personne physique ou morale qui le désire.
L’OAPI peut également accepter l’enregistrement d’un signe constituant un label de qualité, mais les règles de certification des produits et les obligations liées aux cahiers des charges sont du ressort des Etats et des organismes qui en ont l’habilitation.o

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