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Revendications sociales  : 68 grèves et sit-in en 2017

 

Au Burkina Faso, l’actualité est rythmée par la grève des enseignants. Cette grève qui perdure depuis 2017 pourrait, si rien n’est fait, déboucher sur «une année scolaire 2017/2018 blanche», selon certaines personnes averties du monde éducatif.
Une énième grève qui vient s’ajouter à d’autres mouvements de revendications et sit-in qui ont émaillé l’année qui vient de s’achever.
A l’Institut Free Afrik, grâce à une démarche scientifique basée sur les données de l’administration, des syndicats et de la presse, on informe que le pays des Hommes intègres a enregistré 68 grèves et sit-in en 2017, 41 grèves et sit-in en 2016, 16 en 2015 et 2014 (voir graphique). Le Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo, directeur exécutif de l’Institut Free Afrik, va plus loin en révélant que 2017 a connu le pic jamais atteint en matière de grèves et sit-in ; et cela, depuis 1960. Les départements ministériels les plus affectés en 2017 sont le ministère de la Fonction publique et de la Protection sociale, le ministère de l’Economie et des Finances (12), le ministère de l’Education (7), le ministère de l’Administration territoriale (6), le ministère des infrastructures (6).
Autres particularités est qu’il n’y a plus eu de grève générale depuis 2015. Et de 2008 à 2017, tous les départements ministériels ont été affectés par des mouvements sociaux. Aussi, les méthodes de grèves et sit-in sont devenues radicales. L’Institut Free Afrik constate que si dans les années 1990 les revendications des travailleurs portaient plus sur la justice sociale, de nos jours, elles sont plus économiques (salariales).

Mais pourquoi ce regain de revendications sociales ?
L’enseignant-chercheur tente de l’expliquer par 9 hypothèses que sont: l’effet de l’insurrection ; l’insurrection qui libère ; les revendications salariales pour rattraper l’évolution des prix (salaires en retard sur les prix) ; les conditions de travail ; les réactions à la satisfaction de la plateforme des magistrats ; un signal donné ; l’inconsistance temporelle des autorités ; les promesses non tenues ; la déstabilisation politique du régime ; l’injustice entre travailleurs et catégories des fonctionnaires ; un gouvernement faible et qui cède facilement; l’opportunité face à un gouvernement faible; la concurrence d’organisations syndicales.
Cette hausse de revendications sociales n’est pas propre au Burkina Faso, avertit le Dr Ouédraogo. Des pays comme le Mali, le Bénin et la Côte d’Ivoire en sont aussi touchés. Loin pour le Burkina Faso de se réjouir du fait qu’il ne soit pas le seul pays touché car, dit-il, les risques encourus du fait de ces multiples remous se résument en d’énormes conséquences planant sur les finances publiques.
Sur ce, il a évoqué la soutenabilité de la masse salariale qui est sans cesse en hausse. Une inquiétude que partage le Premier ministre Paul Kaba Thièba. Celui-ci soulignait à la faveur d’une conférence de presse qui a eu lieu le 10 janvier 2017 que la masse salariale est estimée à près de 52% du budget national.
Or, selon les conventions internationales, elle ne devrait pas dépasser 35%. Le pire à redouter est que cette hausse vertigineuse de la masse salariale ne conduise le pays au gouffre. La conséquence de cette situation serait le retour des institutions de Bretton Woods pour «s’accaparer l’économie nationale». Or, l’application du Programme d’ajustement structurel (PAS) est toujours dans l’esprit des Burkinabè.

Les indicateurs de gouvernance au rouge
Tous les indicateurs provenant de la gouvernance économique, administrative (grèves et sit-in) et sécuritaire au Burkina Faso sont au rouge. Et de l’avis du Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo, directeur exécutif de l’Institut Free Afrik, si rien n’est fait pour redresser la barre, le pays court tout droit à l’impasse. Mais de l’avis de cet enseignant-chercheur, si l’impasse était atteinte, la responsabilité sera collective ; contrairement à ce que pense une certaine opinion qui croit toujours que la faute incombe aux dirigeants. Et pour cela, il en appel à une prise de conscience collective car, dit-il, les maux qui minent le développement du Burkina concernent chaque Burkinabè.
Cette conviction de l’Institut Free Afrik qui découle d’une démarche scientifique est contenue dans un rapport appuyé par des chiffres officiels qui seront bientôt communiqués à la population. Pour que les remous sociaux baissent, l’Etat gagnerait à remettre le pays au travail et à engager de façon beaucoup plus «crédible et professionnelle» le dialogue social. Toujours sur ce volet, il a fortement recommandé que le gouvernement puisse agir avec efficacité sur les dépenses publiques et les recettes.
Sur le chantier de la lutte contre la corruption, l’Etat doit renforcer les textes législatifs et doter conséquemment les différentes structures de lutte de moyens. Il est question ici de la réforme de l’ASCE-LC, de son autonomie financière pour plus de vigueur dans la lutte, de l’accélération de la réforme des corps de contrôle. «Il faut faire en sorte que la lutte contre la fraude soit engagée avec de vrais moyens. Il nous semble que c’est le chantier le plus important dans lequel l’Etat peut engranger des ressources publiques conséquentes. Cela pourra crédibiliser davantage la gouvernance», fait-il remarquer.

Plus d’une centaine d’attaques terroristes depuis 2015
Sur le chantier sécuritaire, le Dr Ouédraogo regrette que d’avril 2015 à 2017, le Burkina Faso ait subi plus d’une centaine d’attaques terroristes, avec plus d’une centaine de morts. Il se dit préoccupé de la pose des mines anti-personnelles dans la partie nord du pays. Pour cela, il recommande un élan national, et surtout une bonne collaboration entre FDS et populations. L’ensemble de ces préoccupations sera bientôt consigné dans un rapport intitulé «Réarmer la gouvernance», avec le soutien de l’Union européenne et de Diakonia. Lequel rapport sera porté à la connaissance du public, dans le but de susciter un débat fécond pour enrichir le document. C’est en prélude à la sortie de ce rapport que Free Afrik a organisé du 10 au 12 janvier 2017, à Ouagadougou, cet atelier de restitution des résultats de ses enquêtes sur la gouvernance économique, administrative et sécuritaire dans la mise en œuvre du PNDES.

RD

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