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Dossier

Zéphirin Diabré (Chef de file de l’opposition) Que cache le Forum des insurgés?

 

Le chef de file de l’opposition politique (CFOP), par ailleurs président de l’Union pour le progrès et le changement (UPC), se veut direct dans l’entretien qui suit. Zéphirin Diabré fait une halte sur les dernières déclarations du président de l’Assemblée nationale, Salifou Diallo, parle de son projet, le Forum des insurgés, de son sentiment par rapport à la gouvernance actuelle, avant de prévenir : «On ne veut pas refaire une autre insurrection, sauf si… ».
L’Economiste du Faso : On remarque que, ces derniers temps, vous semblez déçu de la gouvernance actuelle. D’où vient cette amertume ?
Zéphirin Diabré (président de l’UPC et chef de file de l’opposition politique): Ce n’est pas une amertume, mais un constat. Je suis un homme politique qui parle à ses concitoyens; donc je me fais le reflet du sentiment populaire. D’ailleurs, allez sur le terrain et parlez aux syndicats, aux opérateurs économiques, aux revendeurs, aux femmes du marché, aux jeunes dans les kiosques, etc., tous vont vous dire que ça ne marche pas, que les affaires sont bloquées, que l’argent ne circule pas, que le pays est à sec, et qu’ils ne sentent pas que le gouvernement se bat pour eux.Même au sein du pouvoir, on entend la même chose. Le président de l’Assemblée nationale, Salifou Diallo, ne prend pas de gant pour faire la même critique. Et dans des termes plus durs !

A ce propos, en tant qu’économiste, quel commentaire faites-vous de la déclaration du président de l’Assemblée nationale, Salifou Diallo, qui demande à l’exécutif de dire « non » à la Banque mondiale et au FMI ?
C’est effectivement ce que j’ai lu dans la presse. Ça m’a fait tiquer. Il dit non seulement de dire « non » au Fmi et à la Banque mondiale, mais surtout de procéder à un endettement massif du pays pour nous permettre de lancer des projets ambitieux. En écoutant le président de l’Assemblée nationale, on le sent de plus en plus critique vis-à-vis de son propre gouvernement et de son propre régime. Je ne sais pas ce qui se passe. En général, quand une équipe est au pouvoir, il y a au moins un devoir de solidarité de la part de ses membres. J’ajoute que lui, en tant que président de l’Assemblée nationale et président du parti au pouvoir, il a tous les moyens pour faire en sorte qu’il y ait une inflexion de la politique du gouvernement s’il le souhaite. Il peut censurer le Premier ministre s’il estime que son gouvernement ne fait pas un bon travail. Il peut aussi donner des directives pour que la politique menée par le gouvernement aille dans le sens qu’il souhaite.
Pour revenir au fond de la question, le Burkina Faso est libre de cesser toute collaboration avec le FMI et la Banque mondiale. Si le Burkina Faso estime qu’il n’a plus besoin de leur assistance, il prend simplement la décision de se retirer de ces organisations dont nous sommes membres depuis notre indépendance. Mais s’il y est, alors il accepte les règles. Cela dit, est-ce que c’est une décision facile à prendre et à assumer? C’est au gouvernement d’en juger. J’observe seulement qu’aucun régime de ce pays depuis l’indépendance, y compris celui de Thomas Sankara, n’a osé pendre une telle décision. Dans le fond, je suis d’avis avec lui que ce n’est pas la coopération internationale qui développe un pays, mais plutôt la vision de ses dirigeants et les ressources humaines et naturelles dont il dispose. Les pays qui ont émergé sur la scène économique mondiale ces dernières années (Chine, Inde, Brésil, Malaisie, Singapour, Thailande, etc.) n’ont pas attendu l’aide de la Banque mondiale ou du FMI pour le faire.

Que dites-vous de l’emprunt massif dont il parle ?
Paradoxalement, c’est l’un des points sur lesquels je serai peut-être d’accord avec lui, à certaines conditions. Je suis content que Salifou Diallo ait changé d’avis sur cette question. J’ai lancé cette idée pendant la campagne électorale (Ndlr, présidentielle 2015). Maitre Sankara Bénéwendé, ses camarades et lui m’ont vertement critiqué là-dessus. Une fois au pouvoir, ses camarades et lui se rendent compte aujourd’hui qu’ils ont besoin d’une grosse quantité d’argent pour relancer la machine économique. Or, ils ne peuvent pas faire ça avec les petits montants qu’on leur donne ici et là, surtout que ce sont des fonds déjà affectés à des projets précis. C’est ce que lui-même dénonce en disant qu’il faut «éviter de se faire perfuser à petites doses» comme c’est malheureusement le cas aujourd’hui. Et ils n’auront jamais cette grosse somme avec le FMI, la Banque mondiale, la France, les USA, etc. Ils ne pourront pas non plus la mobiliser sur le marché obligataire de l’UEMOA. Ils viennent de lancer un emprunt obligataire dans l’UEMOA. Ils auront au maximum 50 milliards. C’est loin du compte. Pour les très gros montants, par exemple 1.000 milliards de francs CFA, d’un seul coup, avec une liberté totale d’investissement, il faut forcément attaquer le marché financier international. C’est ce que j’avais dit pendant la campagne. C’est ce que viennent de faire le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Congo Brazzaville, etc. Mais il ne s’agit pas de s’endetter pour s’endetter. Il s’agit surtout d’en faire le meilleur usage et c’est là où nos pays ont failli.

Vous affirmez que certains Burkinabè pensent que la situation était meilleure sous l’ère Compaoré. Est-ce également votre avis ?
Non, j’ai dit que l’on entend cela dans les quartiers populaires. Et je ne suis pas le seul.

Et votre avis personnel ?
Je vous relate un sentiment populaire, qui est sans doute mû par la déception. Et en répétant cela, je veux illustrer cet état de déception. Les gens souhaitaient une amélioration et, visiblement, elle n’est pas là. D’où ce genre de commentaires !

Cela vous amène-t-il à regretter l’ère Compaoré ?
Je n’ai pas à regretter telle ou telle ère. Je suis un homme politique qui s’est engagé dans un combat d’opposant depuis le temps de l’ancien régime, parce que je n’approuvais pas certains aspects de sa politique. Pour moi, la meilleure ère pour le Burkina sera celle où le programme que je propose sera appliqué.

Que cache le Forum des insurgés que vous envisagez d’organiser en octobre prochain ?
Ça ne cache absolument rien ! D’abord, le nom définitif de l’évènement n’est pas encore arrêté, ni le thème. La Coalition y travaille avec ses partenaires. En fait, nous avons été interpellés par beaucoup de nos camarades qui étaient avec nous au CFOP. Pour eux, on a eu l’insurrection, la Transition et actuellement un régime issu des élections de novembre 2015 ; chaque phase a eu ses bons et ses mauvais côtés. C’est important que tous les acteurs de cette période, ceux qu’on appelle couramment les insurgés, puissent se retrouver pour faire le point. Nous étions d’une aventure, y a-t-il quoi de mal à en tirer un bilan, faire ressortir les bons acquis, mais aussi les fautes et les erreurs, évaluer l’état des attentes, voir comment envisager l’avenir? Tout le monde sera invité, quelque soit son bord d’hier ou d’aujourd’hui, et viendra qui voudra. Des questions importantes seront examinées. Même les questions délicates comme celles de la réconciliation nationale seront évoquées lors de ce Forum. Et des recommandations seront faites.
Vous parlez d’insurgés. Ce qui sous-entend que le MPP, l’UNIR/PS et les OSC y seront conviés également.
Tout à fait, ils le seront, sauf s’ils déclinent. A mon avis, il n’y a pas de problème en cela. Les OSC sont déjà de la partie.
Quand au MPP et à l’Unir/Ps, nous attendons qu’ils prennent part, fort de leur statut d’insurgés, statut que personne ne peut leur nier. Mais nous allons en profiter pour les interpeller puisque ce sont eux qui sont au pouvoir. Et ils auront ainsi l’occasion de nous dire des choses que nous ignorons peut-être.

Ablassé Ouédraogo de «Le Faso Autrement» estime que ce Forum n’est pas opportun, pour les besoins de la réconciliation…

Il est libre de ses avis. Mais il n’est pas membre de la coalition ; ce n’est donc pas à lui de dire à notre coalition ce qu’elle doit faire ou ne pas faire. S’il est par hasard invité à ce Forum et qu’il pense que c’est inopportun, il peut décliner. J’ajoute que je ne vois pas en quoi la Conférence est contre la réconciliation. Les partis politiques de l’ancienne majorité seront invités, sauf s’ils déclinent. Le thème sera d’ailleurs évoqué et amplement discuté, même si ce ne sera pas le seul. Et des recommandations seront faites. Quelque part, le chemin de la réconciliation passe par là. Peut-il y avoir réconciliation dans ce pays si les insurgés n’en sont pas convaincus ?

A travers vos actes et actions, n’êtes-vous pas en train de vouloir dupliquer ce que le CFOP que vous dirigiez a fait en 2014 ?
Non, pas du tout! Les situations ne sont pas les mêmes. On ne veut pas refaire une insurrection, sauf si le MPP (Mouvement du peuple pour le progrès) ramène l’article 37. Cela dit , il faut que nous soyons tous collectivement attentifs aux cris de douleur du peuple. Quand les peuples sont découragés, n’importe quel aventurier devient une porte de sortie. Et ça c’est dangereux pour tout le monde.

Ne pensez-vous pas que vos analyses trop défaitistes puissent décourager les partenaires et amis du Burkina qui pourront de ce fait hésiter à y investir ?
Mon rôle d’opposant, c’est de faire la critique de ce qui se passe pour que le gouvernement s’améliore. Les partenaires techniques et financiers n’ont pas besoin de moi pour analyser la situation. Ils connaissent ce pays comme leur poche. Et sur ce registre, je dois dire qu’ils portent sans doute plus d’attention aux propos d’un Salifou Diallo, deuxième personnage de l’Etat, qu’à ceux d’un Zéphirin Diabré.

Vous traitez la presse de corrompue en lui adjoignant un corrupteur qui serait le MPP. Des preuves ?
Je n’ai jamais dit que la presse est corrompue. Je dis simplement qu’il y a un travail qui est fait au niveau du pouvoir pour avoir à sa solde des journalistes dans certaines rédactions, pour les recruter, en faire des alliés et influencer leurs articles.
Cela ne veut pas dire que toute la presse est corrompue. Mais que celui qui se sent morveux se mouche et ne se réfugie pas derrière la profession. C’est trop commode. Comme dirait un de vos confrères, que chacun parle pour lui. Quand vous lisez les rapports du RenLac (Ndlr, Réseau national de lutte anti-corruption) et que vous vivez dans ce pays, vous savez très bien que la corruption existe dans ce pays et dans tous les milieux. Chez les politiciens, chez les douaniers, chez les infirmiers, chez les commerçants, chez les juges, etc, et on le dit à longueur de journée. Vous pensez que le milieu de la presse est différent des autres milieux ?

Avez –vous des preuves de ce que vous avancez ?
Si on dit que tel journaliste est corrompu, là il faut des preuves. Mais dire que la corruption existe dans un milieu n’appelle pas à des preuves. C’est un sentiment que l’on est libre d’exprimer. Celui qui n’est pas d’accord, il contredit. Et le débat continue.

Ceux qui caressent votre parti dans le sens du poil sont-ils aussi des alliés de l’UPC ?
Nous ne demandons pas à quelqu’un de nous caresser dans le sens du poil et personne ne le fait, d’ailleurs. Par contre, quand je lis ou quand j’écoute les commentaires de certains de vos confrères suite aux critiques que je porte sur le gouvernement, j’ai parfois l’impression d’avoir affaire à des avocats du MPP. Or, pour moi, c’est au MPP de trouver les arguments pour démonter mes arguments, pas à eux, puisqu’ils sont supposés être neutres. Je ne demande à personne d’approuver ce que je dis, mais je demande qu’on arrête de défendre mon adversaire politique. Qu’il se défende lui-même !

Propos recueillis par Alexandre Le Grand ROUAMBA


En quoi la «coalition Zéph 2015 » est-elle toujours d’actualité ?

Zéphirin Diabré revient sur la nature de la coalition qui porte son nom: «La Coalition Zéph 2015 est un ensemble de partis qui se sont regroupés autour de ma candidature lors de l’élection présidentielle de novembre 2015, avec un programme intitulé en son temps « Le Vrai changement ». Après les résultats, nous avons pris acte du verdict des urnes. Après être partis féliciter le vainqueur, nous sommes revenus nous retrouver pour nous poser une question: que fait-on? Après analyse de la situation, nous nous sommes demandés si nos anciens camarades du CFOP qui sont arrivés au pouvoir allaient pouvoir apporter le vrai changement que les Burkinabè attendaient. Notre réponse collective était dubitative. Et, partant de là, nous avons décidé ensemble de rester à l’opposition et de les voir à l’œuvre. Aujourd’hui, nous constatons malheureusement que nos craintes étaient fondées. La coalition continue son combat pour Le Vrai Changement, tout en étant membre de la grande famille de l’opposition. Cette opposition, je le rappelle, n’est pas une organisation, mais juste une rencontre de partis partageant le simple fait de ne pas approuver la politique du gouvernement en place. D’ailleurs, elle n’est régie par aucun statut ou règlement intérieur et, sous l’ancien CFOP, les partis se sont opposés à cette idée. Les membres de notre coalition, tout en désapprouvant la politique du gouvernement en place, se sont déjà accordés sur la politique alternative, le programme du Vrai Changement. Mais les partis de l’opposition actuelle ne se sont pas encore accordés sur une vision commune, sur un programme commun, sur une alternative commune. Le pourront- ils vu les différences qui les séparent? Et quand ? Je ne sais pas. Mais si demain ils y arrivaient, cette politique alternative commune deviendra notre référentiel. En attendant, nous continuerons à présenter notre alternative à nous !»

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RAF

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